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Oxygène
2.0Note Finale

Voilà. C’est à grand renfort de promotion que Netflix nous (sur)vend Oxygène, nouvel ersatz de film concept déployé cette fois dans un lieu clos. Le point de départ donnera aux amateurs du cinéma de Alexandre Aja de quoi tirer l’analyse vers l’allégorie du monde actuel, entre virus, confinement et tout le toutim. Et pour enfoncer le clou, ils pourront toujours saupoudrer l’ensemble d’une symbolique au Stabilo avec la cellule de cryogénie assimilée à la matrice du ventre maternel comme au catafalque mortuaire. Pourquoi pas ? Las, et comme souvent avec les idées joyeusement ludiques de survival jusqu’au-boutiste (Cube, La Plateforme, Buried et d’autres), Oxygène ne parvient jamais à dépasser son concept. Ni à tenir sa promesse initiale.

Mais revenons aux prémices du projet. Depuis le mitan des années 2010, le script de Christie LeBlanc faisait partie de la Black List, une catégorie de scénarii considérés de qualité qui traînent dans les bureaux de Hollywood en attendant d’être greenlightés. Si Anne Hathaway s’intéresse au rôle et projette de produire le film, elle abandonne finalement la course et c’est la boîte de production Wild Bunch qui rachètera les droits avant de faire lire la chose à Alexandre Aja. Pour celui-ci, c’est l’occasion de revenir à un projet en France, porté par l’actrice Mélanie Laurent (en remplacement de Noomi Rapace) qui occupe quasiment seule l’espace du film en jeune femme amnésique qui se réveille dans une capsule de cryogénie dont la réserve d’oxygène tend à baisser. Bonjour l’angoisse ! Mais l’axiome est là : unité de temps, de lieu et d’action… enfin presque. Car en jouant sur la représentation fragmentée du passé de l’héroïne, le cinéaste prend le risque de rompre avec sa mise en place dramatique. A force de vouloir humaniser son héroïne pour accentuer la tension, le réalisateur essaye de jouer sur l’interprétation de son personnage et celle du spectateur, pose maladroitement la question de savoir si tous ces épisodes mémoriels sont les restes d’une réalité passée ou les fantasmes déformés provoqués par le mal de l’isolement. Par sa froideur et son manque de subtilité, cette ambiguïté n’est jamais assez tangible pour justifier de briser le principe de claustrophobie.

Ainsi, le film de parvient pas à jouer sur la psychologie d’un personnage en creux et se contente de ne travailler que l’effroi ou l’angoisse de la situation. Pour cela, Aja déploie une batterie technique et nul doute qu’il s’est amusé à imaginer toutes les astuces possibles pour ne pas lasser le spectateur ou multiplier les mêmes effets. Mais si toute cette énergie est mise au service du strict concept, c’est au détriment du reste. Le film passe ainsi à travers son histoire d’amour avec le personnage interprété par Malik Zidi, ce corps quasiment abstrait, sans voix, et ne parvient jamais au-delà du suspens immédiat, notamment avec l’ordinateur de bords M.I.L.O. qui reste une voix sans âme (mais quand même celle de Mathieu Amalric) uniquement prolongé par un bras-serpent capable de réconforter ou donner la mort. Le spectateur reste alors à distance. Observateur privilégié d’une course contre la montre aux enjeux dévoilés au fil de twists convenus, en déficit de tension. Un comble pour un cinéaste s’étant fait un nom sur un film intitulé Haute Tension (2003).

En concentrant le film sur cet « escape game » minimaliste, Alexandre Aja réserve malgré tout quelques petites surprises, un ou deux jumpscares sympathiques et des effets spéciaux inégaux parfois à la limite du kitsch. Mais l’héroïne reste cette coquille opaque sur laquelle rien ou presque ne se projette. C’est d’autant plus dommage que le sujet pouvait donner matière à réflexion, à quelque chose de plus fort, de plus intense qu’une métaphysique et des concepts vaguement effleurés. Le film, sans poésie, reste plus proche des Washowski que de Tarkovsky, même en mode série B. Mais quitte à s’économiser dans la réflexion profonde, autant aller jusqu’au bout du concept, sans compromis en rejetant les références superflues. La dernière partie du film, avec son pathos sans véritable suspense habillée de surimpressions datées et d’une musique très inspirée du Zimmer de Interstellar (rappelons que Robin Coudert déteste par ailleurs la musique du composteur), est à l’image, brouillonne, de tout le film. A la finale, même si certains crient au génie (notez le jeu de mots premium) difficile de considérer Oxygène comme une véritable bouffée d’air frais (rebelotte).

Oxygene - Alexandre Aja (2021)

Titre : Oxygène

Réalisé par : Alexandre Aja
Avec : Mélanie Laurent, Mathieu Amalric, Malik Zidi…

Année de sortie : 2021
Durée : 104 minutes

Scénario : Christie LeBlanc
Montage: Stéphane Roche
Image : Maxime Alexandre
Musique : Robin Coudert

Nationalité : France
Genre : Action

Synopsis : Une jeune femme se réveille seule dans une unité cryogénique. Elle ne sait plus qui elle est, ni comment elle a pu finir enfermée dans une capsule de la taille d’un cercueil. Tandis qu’elle commence à manquer d’oxygène, elle va devoir recomposer les éléments de sa mémoire pour sortir de ce cauchemar...

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