Le parcours de Dario Saraceno est pour le moins étonnant. Formé au Berklee College of Music de Boston, il est, tout à la fois, musicien de studio, professeur de guitare, artiste solo et … acteur professionnel ! Optic nerve est son cinquième album depuis 2011. Si son nom n’évoque rien pour vous, la liste des musiciens l’accompagnant sur ce disque témoigne en revanche du sérieux de l’artiste comme de la qualité de l’oeuvre. Ainsi, tout d’abord, la section rythmique est assurée par l’imparable duo que constituent Tony Levin (Liquid Tension Experiment, King Crimson, Peter Gabriel) et Jerry Marotta (Peter Gabriel, Paul McCartney, Orleans). Dario s’est également adjoint les services du brillantissime Trey Gunn (King Crimson) célèbre pour sa maîtrise de la Warr guitare, cet instrument essentiellement prévu pour un jeu axé tapping et des morceaux en contrepoint, ainsi que du saxophoniste alto Adam Siegel, reconnu pour ses qualités d’improvisation.
Dario confie avoir pour influences des maitres tels que Allan Holdsworth, Jimmy Page, Jeff Beck ou Joe Satriani. Mais n’en concluez pas pour autant que Optic nerve est un album de shredder. Bien loin de là. Et d’ailleurs, tout au long de ce disque, Dario touche à tout et s’applique à savamment brouiller les pistes. Le titre d’ouverture, l’instrumental « Deities in Splendor », en est peut-être l’illustration la plus parfaite : une lente montée en tension, avec cette guitare menaçante qui laisserait présager une implosion voir un déluge de feu, mais qui ouvre à contrario sans transition sur un univers jazzy swinguant, auquel succède une ambiance électro planante et laquelle se prolonge par une attaque frontale particulièrement acérée aux accents métal avant de finalement rebondir vers l’univers jazz du début… Le tout en l’espace d’à peine 7 minutes !
Cet étonnant éclectisme se retrouve également sur « Designated Skin », instrumental lui aussi, auquel contribue Trey Gunn, et qui est assurément l’une des compos les plus réussies de cet album. Le morceau démarre de manière relativement conventionnelle, nonobstant le splendide thème à la guitare, puis s’écarte vite des chemins balisés, dans un esprit jazz-rock avec cette alternance guitare/ saxophone avant de finalement culminer avec un passage presque «free» aux tonalités qui n’auraient pas déplu à Soft Machine.
Et lorsqu’il décide d’opter pour des morceaux moins alambiqués, là encore, Dario s’offre des incursions dans des territoires musicaux tout aussi différents les uns que les autres. « Sustained and distorted » avec son intro qui nous rappelle le « Dr Feelgood » de Motley Crüe est résolument heavy-rock (à l’exception du chant). « Smile/Lies » s’appuie sur une rythmique quasi funk. Et « Saint Street » nous invite à une ambiance plus délicate et aux consonances presque bluesy. Et si ces morceaux n’ont ni l’originalité ni l’inventivité des deux instrumentaux évoqués plus haut, ils n’en demeurent pas moins très agréables à écouter.
Et enfin, histoire de nous faire perdre définitivement tout repère, Dario prouve de manière éclatante avec « This Moment » qu’il est également capable d’écrire des morceaux courts et calibrés pour les ondes, diablement entraînants et dont la mélodie s’instille insidieusement dans votre tête.
S’il est compliqué à l’écoute de Optic nerve de pouvoir cataloguer Dario and the Clear dans un style bien précis, nous pourrons à défaut convenir que cet album est avant tout celui d’un artiste qui prend un manifeste plaisir à explorer tous les styles musicaux qu’il affectionne et à rendre hommage à tous ceux qui l’ont inspiré. Un album très bien exécuté, surprenant et rafraichissant.
DARIO AND THE CLEAR – OPTIC NERVE
Titre : Optic Nerve
Artiste : Dario and the Clear
Date de sortie : 2021
Pays : États-Unis
Durée : 33′
Label : Triple D Records
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