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The Lodger
4.3Note Finale

Hitchcock considérait The Lodger (Les Cheveux d’Or) comme son premier véritable film. En réalité, cette troisième réalisation pour les Gainborough Pictures intervint après The Pleasure Garden en 1925 et The Mountain Eagle un an plus tard. Cela dit, jamais le cinéaste de 26 ans à peine n’avait exprimé ses obsessions de la sorte. En jouant visuellement de la culpabilité (vraie ou fausse) de ses personnages, il donnait un premier coup de canif dans une œuvre en devenir. Premier essai fondamental sur le suspense, cette histoire de tueur en série (sujet peu visité à l’époque) horrifiant ses contemporains permet à Hitchcock de jouer sur les gros plans (dès l’introduction), les objets signifiants, et de poser un premier jalon dans son obsession latente pour les chevelures blondes. Tous les artefacts de son cinéma à venir sont présents.

Esquissé ou dessiné profondément dans la chair pelliculée, The Lodger baigne dans un expressionnisme que l’anglais avait peaufiné en allant rendre visite au maître Fritz Lang alors occupé sur le plateau de Metropolis, et faisant par ailleurs de Friedrich Wilhelm Murnau l’une de ses influences manifestes. Il faut dire que cette adaptation très libre de l’histoire macabre et sanglante de Jack L’Éventreur (rebaptisé ici « Avenger ») recélait tout le matériel horrifique, érotique, fétichiste et pervers pour mettre en action sa mécanique du suspens : cri « muet » de la victime, jeux de lumière sur les cheveux, déplacement de l’horreur des rues de Londres noyées dans un fog cliché vers le petit intérieur cossu d’une maison familiale (on pense à Psychose évidemment ou aux Enchaînés) et le centre de gravité que représente le mystérieux oncle Charlie.

Thème cher aux futurs films de Hitchcock, l’ombre du doute plane alors avec un effrayant quotidien au dessus de cette famille rongée d’une peur indicible symbolisée par un escalier, véritable personnage central, qui semble séparer les éventuelles futures victimes de leur potentiel bourreau. Il suffit de voir la façon dont le réalisateur organise la sortie nocturne de celui qui passera rapidement d’objet de curiosité à suspect, en se jouant des effets d’ombres et de lumières. Ce film fondateur, à plus d’un titre, du style bientôt estampillé Alfred Hitchcock joue également la charge sentimentale, avec cette attirance de la jeune Daisy pour ce curieux locataire et la façon qu’elle aura de le défendre face au policier qui lui était auparavant promis. Basculement moral du plaisir coupable. Le jeu d’Ivor Novello, grande vedette de l’époque et par ailleurs compositeur, renforce ces effets en demi-teinte, ce pouvoir d’attraction mortifère, loin des canons de nonchalance à venir (immortalisés par Cary Grant, James Stewart). Un rôle si marquant qu’il le réinterprètera dans un remake parlant (et oubliable) signé Maurice Elvey (Meurtres, 1932).

En construisant sa grammaire visuelle, son sens du découpage pour jouer sur une angoisse prégnante, une paranoïa tiraillée par une dilatation de l’espace-temps si caractéristique du réalisateur, une imagination vertigineuse comme ce plan, renversant, d’un plafond transparent qui laisse entrevoir à l’étage le fantasme d’un locataire faisant les cent pas. Une parfaite démonstration de l’art, espiègle, des faux-semblants dont il se fera un spécialiste. Mais ceci est une autre histoire…

 

THE LODGER de Alfred Hitchcock

The Lodger - Alfred Hitchcock (1927)

Titre : Les Cheveux d’Or
Titre original : The Lodger – A Story of the London Fog

Réalisé par : Alfred Hitchcock
Avec : Ivor Novello, June Tripp, Malcolm Keen…

Année de sortie : 1927
Durée : 75 minutes

Scénario : Eliot Stannard, Alfred Hitchcock (non crédité), d’après le roman The Lodger (1913) de Marie Belloc Lowndes
Image :  Hal Young, Gaetano di Ventimiglia (sous le nom du Baron Ventimiglia)
Montage : Ivor Montagu

Nationalité : Angleterre
Genre : Policier
Format : Noir et blanc – film muet

Synopsis : Le “Vengeur” sème la terreur à Londres en assassinant des jeunes filles blondes. Les rares témoins qui ont pu l’apercevoir décrivent un individu qui se cache le bas du visage. La nouvelle d’un nouveau meurtre est répandue via les journaux. Non loin de là, Mrs. Bunting loue une chambre d’hôte à un mystérieux étranger qui attire immédiatement la suspicion…

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