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Michael Polnareff - Pyjama’s Bloody Juggernaut
5.0Note Finale

La nostalgie, comme le spleen, est un sentiment plein de noblesse mais qui ne fait pas forcément les délices des contempteurs. La mémoire serait donc « une fuite en avant pour mieux occulter le vide existentiel d’un présent trop futile ». Voici comment est introduit Pyjama’s Blood Juggernaut, œuvre protéiforme, réincarnation improbable, inattendue et spectaculaire de l’histrion Michel Polnareff, de retour de nulle part. Sans prévenir. Notons au passage l’étonnante mutation nominale qui n’est pas sans rappeler celle de Mike (Michael) Oldfield sur Heaven’s Open (1991). Alors l’ami frisé force la dose (« Les trous noirs sont troublants ») avec cette impression de vouloir tout réinventer sur ces trois disques (!) en forme de trilogie mystique et divine, empilage de sensations fortes, jamais plantées dans l’impasse decet album déconstruit (« Puéril en la Demeure »).

En voulant se frotter à un rock progressif “pur premium” sur-vitaminé et en quittant le cocon étouffant d’une pop qui ne le satisfaisait définitivement plus, Mich(a)el vire au projet récréatif, libéré, délivré comme jamais des forces centrifuges de majors goinfrées d’oseille. Tout ce barnum bardé d’un concept pour le moins obscur : l’histoire d’un pyjama égaré au cours d’un voyage initiatique le long du Transsibérien… en 1989. Métaphore évidente d’une condition humaine bariolée, déchirée, qu’il ne connaît que trop, l’album surprend par sa fluidité et son sens de la jubilation instrumentale (« Héliport Cochon » »). Pourtant, la tonalité chaude et enivrante de l’œuvre (« Alien et les Garçons », « Nicolas Sarcophage Debilum », « Le thon de la rivière Kwaï ») n’empêche pas l’angoisse de revenir au galop avec le feuilletonesque « Palindrome Pyjama » réparti en cinq tranches de pain complet, ponctué d’un sens de la dramaturgie maîtrisée (et l’appui des Chœurs de l’ex Armée Rouge). Un sentiment d’incertitude et du chaos toujours dans l’ombre. Mais la sérénité sait pointer sur « Émétisante Calliope » et le propos, comme la musique, se radicalise peu à peu (« G ! »).

« […] C’était l’après-midi, au milieu des vaches folles, l’écureuil nous sourit sur un vieux rock’n’roll […] »

Les musiciens, au diapason, combinent ces ingrédients avec une énergie qui donne tout son sens au projet. Les références sont légion, plutôt étrangère, mais classiques et classieuses : Gentle Giant, Genesis, Pink Floyd, Emerson Lake & Palmer, Van Der Graaf Generator, King Crimson, Kansas se bousculent aux postillons. En mélangeant des artistes venus d’horizons aussi divers que le trio Donati, MacAlpine, KatchéLe retour d’Émile Piedeplomb »), Percy Flage (« Du pareil aux Nems »), Kelly Diot (« Obédiance Apétence ») ou une Lana Del Rey étonnante à la flûte à bec (« Le grand cierge »), l’album ne se fige jamais, abordant même l’autodérision libertin-libertaire (« Le Pale des Nazes »). On retrouve même quelques numéros étonnants (Avril Lavigne, Bruno Mars, Mathilda May, Tom Novembre et January Jones sur « La Pelle du 18 Juin » en adaptation libre de June Carter) qui évitent le simple empilement de bonnes volontés. Et le sommet sera atteint sur le troisième disque composé de l’unique « Bovide COVID », entre grand messe et requiem définitif, où copulent allègrement luxe et chaos, chic et barbarie musicale, avec un sens du rythme nombriliste rare.

« […] Ce pyjama resté pendu, condamné à flotter jusqu’au nues, nous laissant las, si seuls, si nus […] »

Cirque existentialiste (nous serions tous des pyjamas souillés !), ce Pyjama’s Bloody Juggernaut (que l’on pourrait traduire à l’emporte pièce en “La force fatale du pyjama ensanglanté“), sous-titré Palindrome Project, délivre près de trois heures et demie d’exercices de styles cuits aux champignons hallucinogènes, avec un authentique amour de la musique qui enveloppe cette voix inimitable, plus remarquable que jamais. Qu’elle ne monte plus aussi haut qu’auparavant n’enlève rien à l’affaire. Ceux qui voudront se mesurer à un tel défi artistique devront s’attendre à une ultime épreuve de force tant cet album plane à des kilomètres au dessus du lot de ses contemporains. Chien fou, hyper-savant, psychédélique et défoncé. La mutation trans migratoire est en marche !

TRACKS LIST

Disc 1 – (70’41)

  1. Intro (1’01)
  2. Le chasseur déprime (4’02)
  3. Roms Coca (2’01)
  4. Palindrome Pyjama I (2’22)
  5. Les trous noirs sont troublants (6’45)
  6. Puéril en la demeure (4’08)
  7. Alien et les garçons (7’47)
  8. Palindrome Pyjama II (2’09)
  9. Le grand cierge (4’25)
  10. Pandiculation pour Pyjama Anonyme (9’57)
  11. Cogner les murs mithridatisés (7’41)
  12. Le retour d’Émilie Piedeplomb (4’11)
  13. Itinéraire d’un enfant gratté (2’07)
  14. Le thon de la rivière Kwaï (11’35)

Disc 2 (76’46)

  1. Le pal des nazes (7’11)
  2. Le tri qui pue (1’02)
  3. Émétisante Calliope (3’21)
  4. Du pareil aux Nems (3’35)
  5. La pelle du 18 Juin (3’01)
  6. Palindrome Pyjama III (1’41)
  7. Héliport cochon (11’47)
  8. Obédiance Apétence (4’12)
  9. Palindrome Pyjama IV (2’43)
  10. Section Dassault (2’47)
  11. Abutyrotomofilogène désaxé (9’41)
  12. PolnaStyle (3’58)
    13. Palindrome V (0’01)
  13. Vladivostok en rayon (5’54)
  14. Palindrome Ultima 666 (6’06)
  15. G ! (9’48)

Disc 3 (66’06)

  1. Bovide COVID (66’06)

Version Deluxe

Double DVD

  • Reportage making-of « Les dessous du Pyjama » réalisé par Grégory Dorcel (4h54)
  • Clips officiels :
    « Abutyrotomofilogène désaxé » réalisé par Sophia Coppola
    « Les trous noirs sont troublants » réalisé par JB. Root

  • Reportage « Histoire avec et sans Pyjamas » réalisé par Frédéric Mitterand (3h21)

  • Album remix 5.1 par Steven Wilson avec commentaires audio de Philippe Manoeuvre

LINE-UP

  • Michael Polnareff / chant, piano assis, piano debout, piano couché
  • Armand Bandouillère / Ondes Martenot, claviers, clavecin, vibraphone
  • Elvire o’Ver / bouzouki, cithare, tamboura, gaïta
  • Nicolas Nicoca / basson, octobasse, basse, chapman stick
  • Percy Flage / harmonica de verre, célesta
  • Tom de Savoie / luth, cornemuse, yatag, tobshuür, vielle, morin-khuür
  • Renault MacAlpine / guitares
  • Virgil Donuti / batterie
  • Manu Patché / batterie
  • Chœurs de l’ex Armée Rouge / chœurs
  • Ensemble vocal de Mufflin / chœurs alcoolisé

Guests :

  • June Summer / flûte à bec
  • Mathilda May Flower / bateau ivre
  • January Jones / murmures
  • Avril Lavigne / pleurnicherie
  • Bruno Mars / sifflements
  • Serge July / abonné absent

MICHAEL POLNAREFF – PYJAMA’S BLOODY JUGGERNAUT

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Titre : Pyjama’s Bloody Juggernaut
Artiste : Michael Polnareff

Date de sortie : 2021
Pays : Ici et là
Durée : 212 minutes
Label : Easter Eggs

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