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Yes - Big Generator
4.8TOP 1987

Dans la série des albums qui fâchent, tâchent et clashent, le douzième opus de YES s’est toujours posé ici ou là. Après le bang supersonique et imprévisible de la fusée 90125 (1983), le groupe toujours composé de Jon Anderson, Chris Squire, Alan White, Tony Kaye et du très influent Trevor Rabin allait donc tenter de doubler la mise… banco, super banco… quatre ans plus tard ! Et pour spoiler sans vergogne, si Big Generator ne rencontrera pas le succès escompté, notons qu’il reste à ce jour leur dernier album certifié millionaire.

Ok, les critiques seront encore plus circonspectes, qu’elles soient issues du versant « mainstream » comme des amateurs du Yes classique estampillé « années 70 ». Les purs et durs. La crème de la crème. Les inconditionels. Les exégètes d’un prog-rock symphonique, subtile, élégant et plein de surprises. Pour ceux-là, le résultat présenté dans cette galette s’apparentera à une véritable séance de boucherie-charcuterie. Un truc qui taille dans le lard en gardant le gras autour. Et si 90125 sonnait déjà comme une trahison partielle mais tolérable vu le succès, Big Generator devait achever leurs espoirs dans un vague « salmigondis heavy rock, surproduit, sans aspérité, partiellement foireux, travesti pour le pire par le duo Rabin/Horn décidément vendu à l’industrie musicale, MTV et consors ».

Aujourd’hui encore, l’évocation de Big Generator conduit, au mieux, le « vrai » amateur de Yes à adopter un mépris poli pour celui ou celle qui aurait l’outrecuidance d’évoquer cette parodie musicale. Exagération ? A peine ! D’ailleurs, comment pourrait-on sainement apprécier ce disque après avoir goûté Close to the Edge, Fragile, Relayer et Going for the One ? Genesis se vautrait depuis un bail dans la fange commerciale (Invisible Touch subira le même procès), Pink Floyd venait de leur emboîter le pas (A Momentary Lapse of Reason sortit dix jours plus tôt), pourquoi aurait-on pardoné à Yes de s’abaisser de la sorte ? Après 90125, il fallait être très optimiste pour les imaginer se faufiler une seconde fois.

Pourtant ! Et c’est ici que cette chronique devrait en faire trésauter plus d’un(e), Big Generator est un putain de bon disque ! Et fuck la doxa ! Enregistré en Italie, Angleterre et aux États-Unis, dans une espèce de chaos à intervenants multiples et bordé de tensions palpables notamment entre Jon Anderson et Trevor Rabin en total désaccords sur l’orientation musicale à adopter. Le premier souhaite un retour au son d’antan quand le second, logiquement, veut absolument enfoncer le clou commercial. Mais au-delà des anecdotes plus ou moins croustillantes (Rabin laissera Anderson composer et enregistrer « Holy Lamb » en solo pour avoir la paix sur le reste de l’album), le résultat offre un vaste champ d’énergie(s), de l’entertainement bien fichu, sautillant, interprété par des cadors en forme, un mélange de styles, de ruptures, de trucs faciles, mémorisables, et d’envolées improbables, d’imperfections charmantes. Un disque assez étonnant, euphorique, bringuebalant qui s’apprécie comme une friandise haut de gamme.

D’ailleurs, le carbonne de « Owner of a Lonely Heart »  déroulé sur la chanson titre n’éclipse pas une guitare effilée et très heavy, d’une brutalité froide et inhabituelle. Le versant plus pop tient même la route avec « The Rythm of Love », bon exemple de chanson qui ne vise rien d’autre que l’efficacité, alors que « Love Will Find a Way » et « Almost Like Love », s’ils peuvent âtre considérés comme les creux de l’album, restent des parenthèses plutôt colorées. Inutile de comparer l’ambition de ces chansons à un « Gates of the Delirium » tant nous jouons ici dans un autre univers, une autre dimension, une autre cour. De ce point de vue, l’album ne perd jamais en efficacité, ni en honnêteté.

Et puisque tout cela se veut tarabiscoté et un poil schizophrène, Big Generator ne se contente pas des recettes formatées. Point culminant, « Shoot High Aim Low » déploie sa mélodie lancinante, prégnante, un cool infaillible sur plus de sept minutes. Si le manque de cassures ou de twists pourra surprendre de la part d’un groupe habitué des chemins de traverse, la partie flamenco et les aspérités aériennes donnent dans un atmosphérique qui emballe. Les envies de vagabonder, quant à elles, ne manquent pas sur « Final Eyes », qui passe du heavy au « radio-friendly », le tout porté par la voix cristalline de Jon Anderson. Le morceau brasse, embrasse, dégage un indéniable sentiment de liberté. Et pour du calibré, Yes se permet quelques embardées pas piquées des hanetons. Cette envie de partir à l’envie (plus qu’à l’envers) se poursuit même avec « I’m Running » (ambiance carraïbe, marimbas, rock, chœurs et compagnie) avant de terminer l’affaire sur le fameux « Holy Lamb (Song for Harmonic Convergence) » étonnament minimaliste vis-à-vis des autres titres – et on comprend pourquoi aujourd’hui. Quasiment hors du cadre ? Qu’importe !

Alors oui, si Big Generator n’avait pas été un album de Yes, nulle doute que les avis auraient été bien plus cléments, et plus si affinités. C’est ainsi. Finalement, l’album signera le départ de Jon Anderson dès la tournée suivante. Une évasion pour la courte aventure ABWH (Anderson, Bruford, Wakemen & Howe) avant de réunir les versions seventies et eighties de Yes sur le très inégal, bordélique et oubliable Union (1991). Mais ceci est une autre histoire…

YES – BIG GENERATOR

Yes - Big Generator (1987)

Titre : Big Generator
Artiste : Yes

Date de sortie : 1987
Pays : Angleterre
Durée : 43’41
Label : ATCO Records

Setlist

1. Rhythm Of Love (4:49)
2. Big Generator (4:31)
3. Shoot High Aim Low (7:59)
4. Almost Like Love (5:58)
5. Love Will Find A Way (4:48)
6. Final Eyes (6:20)
7. I’m Running (7:34)
8. Holy Lamb (Song for Harmonic Convergence) (3:15)

Bonus Tracks on 2009 ATCO remaster:
9. Love Will Find A Way (Edited Version) (4:18)
10. Love Will Find A Way (Extended Version) (7:12)
11. Rhythm Of Love (Dance To The Rhythm Mix) (6:55)
12. Rhythm Of Love (Move To The Rhythm Mix) (4:26)
13. Rhythm Of Love (The Rhythm Of Dub) (7:51)

Line-up

– Jon Anderson / lead vocals
– Trevor Rabin / acoustic & electric guitars, keyboards, strings arrangements (2), lead & backing vocals, mixing & co-producer
– Tony Kaye / keyboards (piano, Hammond)
– Chris Squire / bass, backing vocals
– Alan White / drums, percussion, backing vocals

With:
– Trevor Horn / co-producer
– Kim Bullard / keyboards programming
Soul Lips / horns ensemble:
– James Zavala / horn (4), harmonica (5)
– Lee R. Thornberg / horn (4)
– Nick Lane / horn (4)
– Greg Smith / horn (4)

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