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D’ordinaire les journées promo au cours desquelles nous rencontrons les artistes pour les interviews se déroulent dans des hôtels plus ou moins huppés. Changement de décor aujourd’hui pour une causerie avec Mike Portnoy et Derek Sherinian venus présenter leur nouveau groupe Sons Of Apollo puisque c’est dans un des showrooms de Gibson Europe que nous avons rendez-vous : une adresse qui reste confidentielle, une porte on ne peut plus banale qui cache un paradis de musicien ou les artistes les plus renommés de la scène internationale viennent faire entretenir ou fabriquer leurs instruments.

sons of Apollo - Psychotic Symphony (2017)

Lire la chronique de “Psychotic Symphony”

Mike et Derek, tout d’abord merci de nous accorder un moment, dans ce lieu unique.

MIKE : C’est un endroit magnifique en effet !

 

Vous êtes tous les deux de vieilles connaissances, pouvez-vous nous raconter votre première rencontre avant qu’on discute de votre nouvel album ?

MIKE : Comment nous nous sommes rencontrés ? la première fois ? Ou comment nous nous sommes retrouvés ?

 

Et bien les deux…dans l’ordre (rires)

DEREK : Et bien au départ, j’ai juste passé une audition pour Dream Theater (rires), je postulais pour être le clavier et il était le batteur.

 

Mais vous ne vous connaissiez pas auparavant ?

DEREK : Non, non.

MIKE : On a auditionné Derek en 94 et il a eu le job. Il resté dans le groupe pendant … 5 ans ?

DEREK : Yep, ensuite on s’est retrouvés en 2012 quand Mike a monté PSMS (Portnoy, Sherinian, McAlpine, Sheehan). On a tourné ensemble quelques semaines en Europe et en Asie, et on a vraiment pris du bon temps tous ensemble. On a réalisé qu’on adorait jouer ensemble et j’ai proposé aux autres gars “Hey, si on montait un groupe pour de vrai !”. Mike était impliqué dans plusieurs autres groupes à cette période et les agendas n’étaient pas compatibles…jusqu’à fin 2016 où Mike m’a rappelé. Le temps était venu. A partir de ce moment jusqu’à aujourd’hui ça a été à pleine vitesse pour arriver là où nous sommes aujourd’hui.

Vous considérez Sons of Apollo comme un vrai groupe ou c’est ‘juste’ un projet ?

DEREK : C’est définitivement et absolument un groupe à part entière et vous entendrez parler de nous. On a une vraie maison de disque, un management dédié, nous sommes tous les cinq impliqués à fond dans Sons of Apollo et nous sommes décidés et certains que le groupe va marcher et aura du succès.

 

Comment pourriez-vous décrire, définir ce groupe ?

MIKE : Le style ?

 

Oui et par rapport aux autres groupes avec lesquels tu joues.

DEREK : C’est assez difficile de décrire, on passe par plusieurs styles en fonction des morceaux, mais à la fin, c’est un groupe de rock quoi ! Il y a des éléments métal, progressif dans notre musique, mais à la base c’est du rock, classic rock je dirais.

 

J’ai retrouvé un petit gout de hard rock des années 70 dans certains titres, “God Of The Suns” par exemple m’a rappelé certains morceaux des vieux Rainbow.

DEREK : Cool, du classic rock je te disais, Mike et moi adorons ces groupes, Led Zeppelin, Black Sabbath, The Who, Deep Purple, Rainbow… C’était des précurseurs !

 

Pourquoi ce nom Sons of Apollo ?

DEREK : Mike ?

MIKE : Vas-y, vas-y !

DEREK : Eh bien, Mike joue dans tellement de groupes qu’il a dans son portable une liste de noms dans laquelle piocher au cas où il devrait nommer une nouvelle formation (rires) Si, si vraiment une liste de 200 et quelques noms… Et donc en parcourant cette liste, je suis tombé sur le nom Apollo. Et j’ai trouvé ce nom fort, ça sonnait bien à l’oreille, on a essayé plusieurs combinaisons autour de ce nom avant de tomber d’accord sur ‘Sons Of Apollo’. On a trouvé que ce nom était fort, puissant …

MIKE : Apollo est le dieu de la musique dans la mythologie.

DEREK : Et de la beauté, on a trouvé que c’était approprié.

Mike Portnoy

Donc ce n’est pas un clin d’œil à Aphrodite’s Child (rires) ?

MIKE & DEREK : Non, non (ils se marrent)

MIKE : C’est juste un nom de groupe, mais on l’a trouvé cool. Quand Derek l’a proposé, on s’est focalisé dessus.

 

Mike, si on regarde ce nouveau groupe, est-ce qu’on peut dire que tu es abonné aux Supergroupes ?

MIKE : C’est vrai que si on regarde les 20 dernières années, j’ai eu beaucoup de chance. Je crois avoir joué avec ou dans 28 groupes différents, dont certains avaient un line-up incroyable. Flying Colors possède un line-up incroyable. Metal Allegiance, Winery Dogs dans le monde du métal, Transatlantic dans le monde du prog… Donc oui, d’un certain coté j’ai eu beaucoup de chance de jouer avec tous ces groupes. La plupart de ces line-up avec lesquels j’ai joué et dont j’aurais pu rêver sont effectivement des line-up de rêve… et Sons of Apollo en fait partie, c’est aussi un line-up de rêve pour moi.

« C’est important de jouer avec des musiciens que tu respectes, mais aussi qu’il y ait un véritable esprit d’équipe dans le groupe… » – Mike Portnoy

Ca fait une différence pour toi ?

MIKE : C’est important de jouer avec des musiciens que tu respectes, mais aussi qu’il y ait un véritable esprit d’équipe dans le groupe. Dans tous les groupes que j’ai cités et avec qui encore une fois j’ai eu la chance de travailler étaient tous des musiciens cool, faciles à vivre et à travailler. La collaboration y était vraiment facile à trouver. A contrario j’ai vu des super-groupes imploser pour des problèmes d’ego, de personnalité, et qui n’arrivaient pas à faire ou à trouver des compromis avec d’autres musiciens qui avaient le même parcours ou le même ego qu’eux. Par chance, tous les groupes auxquels j’ai participé jusqu’à présent ont été de bonnes expériences. Je n’ai jamais eu vraiment de gros problèmes mais je sais que ça peut être le cas dans certains groupes, malheureusement.

 

Que pouvez-vous dire les uns des autres ?

MIKE : Hmmm, parler des autres personnes … Bumblefoot est un guitar-hero, et je suis persuadé qu’avec ce disque il va enfin avoir la reconnaissance qu’il mérite. C’est mon opinion.

DEREK : En plus, c’est vraiment un génie, pas seulement musicalement, mais il a un esprit très très affuté, largement au-dessus de la moyenne.

MIKE : Billy Sheehan, évidemment j’ai joué avec lui dans Winery Dogs, on est devenu de bons amis, c’est une légende de la basse. C’est le Jimi Hendrix ou le Eddie Van Halen de la basse. C’est un de mes musiciens favoris en ce bas monde.

DEREK : C’est un bassiste fantastique, je l’ai découvert pour la première fois avec Eat ‘Em And Smile de David Lee Roth. Il y était extraordinaire. Il est un peu plus âgé que nous et a fatalement plus d’expérience. Il nous fait bénéficier de ça…

MIKE : Jeff Scott Soto, pour moi c’est le liant entre les morceaux. Sa voix donne la couleur de l’album, c’était le choix idéal pour ce groupe. Il nous donne cette couleur, ce son classic-rock, presque vintage, il ne cherche pas à aller dans une direction progressivo-métallo-symphonique parce que c’est la mode tu vois…Et finalement Jeff nous apporte une cohérence en tant que groupe.

DEREK : Entièrement d’accord, je ne pourrais pas dire mieux. On connaît Jeff depuis longtemps, à l’époque où il tournait avec Yngwie… 84 ?

MIKE : 85 en fait.

DEREK : Et donc c’est vraiment cool d’avoir des gars comme Jeff et Billy avec nous.

MIKE : Jeff et Billy tournaient ensemble déjà en 85. Jeff avec Rising Force et Billy ouvrait avec Talas. Tu te rends compte ? Je les ai vus sur scène il y a 32 ans et maintenant on est dans le même groupe !

 

Et vous deux ?

DEREK : (en regardant Mike) Juste brillant. Le bosseur le plus acharné que je connaisse.

MIKE : Derek est un énorme clavier. Il joue des claviers avec des couilles… il joue en fait comme un guitariste. Il a la même approche de son instrument qu’un guitariste et c’est un gros déconneur ! C’est un des types les plus drôles que je connaisse. Il essaye vraiment d’être drôle tout le temps.

 

Tu viens d’aborder un point qu’on voulait demander à Derek, tu es un clavier qui est considéré comme jouant comme un shredder, qu’est-ce que ça t’évoques ?

DEREK : Je pense que ça vient des musiciens qui m’ont inspiré. Tu sais ces héros que tu as en poster au mur quand tu es ado. Quand j’étais gamin, j’avais des poster de Eddie Van Halen pas de Rick Wakeman ou de Keith Emerson tu vois. En fait beaucoup de claviéristes sonnent très froid à mes oreilles, je ne trouve pas leur jeu très bon. Approcher les claviers, le jeu sur un clavier comme sur une guitare me donne je pense un son unique, que les autres claviers n’ont pas.

 

Lorsque tu as présenté les membres du groupe, tu as parlé de Bumblefoot. Il a été très malade il y a quelques temps, comment-se sent-il maintenant ? (ndlr : cancer)

MIKE : Il faudrait lui demander ! Mais pour ce qu’on a vu et ressenti avec lui il est en bonne forme et a un moral excellent. Il tourne, travaille beaucoup… vraiment il faudrait lui demander mais il semble désormais en bonne santé. Heureusement pour lui.

Sons of Apollo

Derek, quel type de claviers as-tu utilisé avec Sons of Apollo ?

DEREK : Ahem, j’ai un studio très bien équipé, j’y mets beaucoup d’argent, peut-être trop, donc j’ai un grand choix de claviers possibles, avec presque tout ce qui est disponible actuellement. J’ai utilisé un Hammond B3, un mellotron, et un synthétiseur Moog.

MIKE : C’était quoi ton truc rouge aussi ?

DEREK : Ah oui c’est vrai un Nord Lead aussi.

 

Comment choisis-tu les types de sons et les claviers que tu vas utiliser sur les chansons ?

DEREK : Honnêtement ça vient tout seul. J’ai la toile de fond du morceau en tête, soit avec les démos soit avec juste une ligne mélodique et ensuite je fonctionne à l’instinct. Ce qui me parait naturel pour un morceau arrive tout seul et presque immédiatement.

 

Comment avez-vous fonctionné pour l’écriture de l’album, c’était plutôt collégial ou certains sont arrivés avec des titres déjà finalisés ?

DEREK : Le point de départ a souvent été un riff, une ligne mélodique, autour de laquelle on a brodé, travaillé, parfois improvisé. Bumblefoot avait quelques idées, quelques ébauches qu’il a posées sur papier, envoyées à Mike. Mike et moi avons gardé ce qui nous plaisait le plus en point de départ et ensuite les morceaux ont été terminés avec tout le monde. En fait il n’y a qu’avec “Gods Of The Sun” que ça a différé. J’avais complètement écrit la musique, on l’a gardé tel quel… le reste des titres a été composé de manière très collaborative.

MIKE : Ensuite une fois la musique finalisée, Derek, Jeff et moi avons travaillé les voix, les lignes vocales et les textes. En fait l’écriture s’est faite en deux phases, la musique avec Derek, Bumblefoot et moi, avec parfois Billy sur la fin et Derek, Jeff et moi pour les textes et les lignes de chant.

 

Est-ce que vous pensez tous les deux que c’est une bonne méthode de travail ?

DEREK : (en se marrant) En tous cas, ça semble bien marcher !

MIKE : entre bon potes !

DEREK : C’est un bon système !

 

Si vous deviez décrire le son du groupe, ce serait quoi ?

DEREK (en se marrant) : Vraiment génial (littéralement fucking awesome) !

 

C’est une bonne définition !

DEREK : Que te dire d’autre qu’on n’a pas évoqué ? C’est une fondation classic rock, il y a des moments progressifs pour sûr, il y a du métal.

MIKE : Tu avais trouvé une super définition plus tôt dans la journée.

DEREK (il réfléchit) : Ah oui, un esprit Old School avec une sensibilité moderne… Hey c’est pas mal !

 

Vous avez produit l’album sous le surnom de ‘Del Fuvio Brothers’.

DEREK : Oui c’est un surnom qu’on traine tous les deux depuis une vingtaine d’années.

MIKE : Ca date de l’époque de Falling into Infinity avec Dream Theater. D’ailleurs je crois que si on regarde les crédits de Falling into Infinity, on est crédité sous ce surnom, c’est la première fois que ça a été utilisé.

 

Ça vient d’où ?

MIKE : C’est important de jouer avec des musiciens que tu respectes, mais aussi qu’il y ait un véritable esprit d’équipe dans le groupe. Dans tous les groupes que j’ai cités et avec qui encore une fois j’ai eu la chance de travailler étaient tous des musiciens cool, faciles à vivre et à travailler. La collaboration y était vraiment facile à trouver. A contrario j’ai vu des super-groupes imploser pour des problèmes d’ego, de personnalité, et qui n’arrivaient pas à faire ou à trouver des compromis avec d’autres musiciens qui avaient le même parcours ou le même ego qu’eux. Par chance, tous les groupes auxquels j’ai participé jusqu’à présent ont été de bonnes expériences. Je n’ai jamais eu vraiment de gros problèmes mais je sais que ça peut être le cas dans certains groupes, malheureusement.

DEREK : D’une simple plaisanterie entre copains, il n’y a rien de particulier derrière.

 

Derek, il me semble avoir lu que ton morceau préféré avec Dream Theater était “Lines In The Sand”, il y a une raison particulière ?

DEREK : Pourquoi c’est ma préférée, mais parce que je l’ai écrite pardi ! (ils se marrent)

 

Et peut-on espérer l’entendre sur la tournée ?

DEREK : (en montrant du pouce Mike) C’est à lui qu’il faut demander, c’est lui le maitre de la set-list, s’il veut la jouer, je suis prêt !

MIKE : On en a déjà joué une version instrumentale avec PSMS il y a quelques années, franchement je ne sais pas encore, on n’a pas ficelé la set-list pour l’instant, mais c’est un morceau qu’on va considérer avec attention c’est certain. Pour être franc, je ne suis pas super chaud pour jouer des titres de Dream Theater dont je n’ai pas écrit les textes, mais qui sait, on verra. Il y a plein de très bons morceaux dans le back-catalogue de Dream Theater qu’on pourrait choisir. Quand on a fait la tournée Shattered Fortress, je n’ai joué que des morceaux dont j’avais écrit les textes. Je n’ai pas envie d’être hypocrite, je trouve bizarre d’entendre Dream Theater chanter et jouer les morceaux que j’ai écrits alors que je ne suis plus avec eux. C’est pareil avec Sons of Apollo, ça me ferait bizarre qu’on joue les chante les textes d’autres personnes.

DEREK (à Mike) : Mais quelle est la différence avec la musique ?

MIKE : J’imagine… (il s’interrompt) franchement, James (ndlr : LaBrie) qui chante le texte qui j’ai écrit pour ma mère qui est décédée dans un crash d’avion, c’est bizarre.

DEREK : Oui sur un exemple comme celui-là, c’est vrai je suis d’accord.

MIKE : Je ne veux pas être hypocrite et te faire une réponse à la con… la seule chose honnête que je puisse te dire c’est peut-être. Ce qui est certain c’est que Derek et moi avons co-écrit la musique de “Lines In The Sand”, donc on est légitimes pour interpréter le morceau.

DEREK : Pour être très précis, la musique a été composée par Mike, John Petrucci et moi, en fait j’ai écrit une grosse partie de la musique de ce disque…

C’est un grand morceau…

MIKE : Tout à fait, c’est un des meilleurs titres de cette période.

 

Que peut-on attendre de la tournée et quand allez-vous démarrer.

MIKE : La tournée démarre en février. On débute sur la ‘Cruise To The Edge’ et ensuite on enchaine sur la tournée américaine. Pour l’europe ce sera peut-être au printemps, plus certainement pendant l’été. On y travaille en ce moment, donc on fera les annonces bientôt.

Derek Sherinian

« Durant une bonne partie de ma carrière j’ai dû suivre une direction qu’on m’imposait, jouer la musique d’autres d’un autre et rires aux conneries d’un autre. Là j’ai envie de créer quelque chose, d’être le leader et de prendre les décisions pour le groupe… » – Derek Sherinian

Je pense que vous ferez comme pour la première tournée de Flying Colors : l’album plus des morceaux de chacun de vos groupes précédents ?

MIKE : Oui exactement, c’est quasi obligé quand on a qu’un seul album et qu’on doit fait un set respectable pour le public.

 

Est-ce que Sons of Apollo sera votre principale activité pour 2018 ?

MIKE & DEREK (ensemble et synchros) : Ab-so-lu-ment !

 

Est-ce que ça signifie que vos autres groupes sont mis de coté ? ou mis en sommeil ?

DEREK : Gelés ?

MIKE : Je ne dirais pas qu’on gèle le reste car ça signifierait presque un arrêt définitif, mais tu sais, j’ai jonglé avec plusieurs groupes différents ces sept dernières années, mais c’est finalement facile. Tu as juste à adopter la bonne stratégie, le bon timing. Sons Of Apollo c’est différent, on est tous complètement à fond sur le groupe et les autres activités passeront après si on a le temps et si les agendas le permettent.

 

2018 est l’année Sons of Apollo

MIKE : Complètement. L’année d’Apollo !

 

Donc aucun problème de disponibilité pour aucun d’entre vous.

MIKE : Non, tout le monde à fait du groupe son objectif principal.

 

On se demandait en préparant l’interview : avec tous les groupes différents avec lesquels tu as joué, comment fais-tu pour apprendre et retenir toute cette musique ?

MIKE : J’ai une mémoire d’éléphant. Il y a deux semaines j’ai joué au Morsefest, 5 heures de musique. Le week-end suivant, Shaterred Fortress avec 2 nouvelles heures de spectacle. L’année dernière, il y a eu un week-end ou je suis passé des Winery Dogs à Twisted Sisters et au Neal Morse Band pour finir. Quelques années auparavant je me souviens avoir enchainé Transatlantic, Dream Theater, Avenged Sevenfold. Je suis béni pour avoir cette mémoire d’éléphant. J’arrive à me rappeler de 9 heures de musique comme ça (il claque des doigts). Je vais te dire : je pourrais là, maintenant sans répéter te jouer la démo complète de ‘Your Majesty’ de 86…
(Derek le regarde d’un air effaré)
C’est un don, j’en suis conscient.

DEREK : Je ne dirais pas que j’ai une mémoire d’éléphant de mon côté, plutôt un petit animal de basse-cour pour moi. Tu sais j’ai déjà du mal à me rappeler ce que j’ai dit il y a 5 minutes. Heureusement que j’arrive à me souvenir des morceaux de 20 minutes. (ils se marrent).

 

Qu’aimerais-tu faire que tu n’aies pas déjà fait, quel serait ton rêve ?

MIKE : Pour être honnête, tous mes rêves se sont réalisés. J’ai gagné plein de prix, j’ai joué avec tous les musiciens avec qui je pourrais rêver de jouer… J’ai tourné avec tous les groupes qui me faisaient envie… dans les plus belles salles. J’éprouve beaucoup de gratitude pour ça, la vie et la carrière que j’ai eue jusqu’à maintenant…et j’espère que ça va continuer… mais sans être prétentieux ou blasé, il n’y a rien qui me fasse envie et que je n’ai pas déjà accompli. J’ai envie de continuer sur cette lancée, continuer à créer, à faire plaisir aux fans, à collaborer avec d’autres artistes. Mais je n’ai pas de rêves non réalisés…

DEREK : Moi j’en ai ! (Mike éclate de rire)

DEREK : Durant une bonne partie de ma carrière j’ai dû suivre une direction qu’on m’imposait, jouer la musique d’autres d’un autre et rires aux conneries d’un autre. Là j’ai envie de créer quelque chose, d’être le leader et de prendre les décisions pour le groupe. C’est la différence entre faire partie de quelque chose et créer et amener au succès une nouvelle formation. Je n’ai plus envie de jouer dans le groupe de quelqu’un d’autre désormais. Je veux que le succès soit le mien, pas partager celui de quelqu’un d’autre. Mike a vécu ça avec Dream Theater, moi jusqu’à présent cela ne m’est jamais arrivé. C’est ça mon rêve. Ce groupe, Sons of Apollo, est tout pour moi désormais, j’y ai mis toute mon énergie et âme. Je suis totalement impliqué dans ce groupe. C’était très intense pour moi pendant l’enregistrement, où je me disais, enfin, ce rêve devient réalité. C’est quelque chose que je prends vraiment très au sérieux.

MIKE : (qui a acquiescé pendant que Derek parlait) Je n’avais jamais vu les choses sous cet angle. Je comprends, c’est génial pour toi !

DEREK : On est très fier de ce qu’on a fait sur ce disque qui sort le 20 octobre et on est très impatients d’avoir les feedbacks. On a vraiment hâte de partager ce disque.

 

Mike ton rêve serait peut-être de faire quelque chose en dehors de la musique ? Cinéma ?

MIKE : Ah j’adore le cinéma et les séries (il montre son tee-shirt David Lynch) tu vois un de mes héros là. Mais … je ne pense pas avoir la patience pour ça, je vais me contenter de rester spectateur.

 

Que pensez-vous de l’actuelle industrie musicale ?

MIKE : Les temps sont durs. Il y a pas mal de groupes qui disparaissent ou qui ont du mal à survivre. A côté de ça, il y a une vraie place pour les groupes indépendants qui se prennent en main. Si je prends l’exemple du groupe de mon fils (ndlr Next to One), ils se prennent en main et réalisent leur disque d’une manière très différente de ce qu’on faisait quand nous, nous avons démarré. Ils savent qu’ils ne vendront pas des millions d’albums comme dans les années 70 ou 80, mais en utilisant les réseaux sociaux et youtube, leur musique est diffusée dans le monde entier. Ils ne sont pas obligé d’avoir obligatoirement une maison de disque et de baisser leur froc devant eux. Ils ont des possibilités bien plus larges qu’à notre époque en terme de diffusion. A partir des réseaux sociaux, il y a possibilité de construire sa fan base, mais ça prend du temps. C’est plus dur pour les ventes par contre. Tu sais en un sens avec Sons Of Apollo, même si chacun d’entre nous a déjà une histoire derrière lui, nous montons un nouveau groupe. Il va falloir qu’on fasse tout ça.

DEREK : C’est toujours un défi avec des obstacles, mais j’aime tellement jouer et partager ma musique que l’envie est plus forte que les obstacles. On peut toujours se plaindre, mais d’un autre coté je trouve fantastique qu’en 2017 on arrive Mike et moi à monter un groupe comme Sons of Apollo et jouer ce type de musique, sur un grand label, donc je ne vais pas me plaindre.

 

Mike, que penses-tu du groupe de ton fils…

MIKE : Et bien je les ai vus grandir, se développer… Je les ai emmenés en tournée avec Shattered Fortress. Je pense que Max est un batteur très doué, très talentueux. Il fait des choses que je ne faisais pas à son âge. J’en suis très fier.

 

Qu’est-ce qui vous motive encore à jouer ?

DEREK : Ce n’est pas un choix, une décision, c’est la passion qui nous anime.

MIKE : Je suis un fan de musique, c’est la seule raison. Quelqu’un a un jour dit ou écrit que j’étais dans un groupe pour la célébrité et le pognon, mais ce n’est pas vrai ! Je me suis mis à la musique parce que j’adore ça. Faire carrière n’étais pas une décision ou un choix, c’est quelque chose qui est arrivé. J’ai commencé à jouer et ça a marché, le succès et la carrière sont arrivés, ce n’était pas une intention délibérée. Et ça fait 30 ans que ça dure, j’ai fait une centaine d’album et je bosse aussi dur voire plus dur qu’au début. Je n’ai pas envie de ralentir car j’adore ce que je fais, jouer, tourner, enregistrer, créer… et ce n’est pas basé sur le fait de faire de l’argent. Je suis le même que celui que jouait des morceaux de Kiss dans sa chambre quand il était ado… J’adore ça, c’est ce que je suis. La passion n’a pas bougé, j’ai juste cinquante ans et je suis assis dans cette pièce avec vous à Paris. .. Mais à l’intérieur je suis le même.

 

Je t’ai vu jouer sur un kit Hello Kitty, tu aimes ce genre de déconnades ?

MIKE : J’aime ne pas prendre les choses trop au sérieux. Et Derek pareil, on était les deux dans Dream Theater à blaguer, se marrer sur scène… Le truc avec Hello Kitty , c’était pendant une interview comme celle-ci, je crois que c’était au Gibson showroom de New-York d’ailleurs, et il y avait ce jouet dans un coin, et j’ai improvisé pour rigoler… rien n’était prémédité… et c’est devenu viral sur Youtube. Le truc drôle c’est que Bumblefoot a fait la même chose peu de temps après avec une guitare Hello Kitty !

 

Quels sont vos principales influences ou héros.

MIKE : J’ai des héros à la batterie et des héros musiciens. Pour les batteurs : John Bonham, Keith Moon, Ringo Starr, Neil Peart… C’est mon big four. Si on élargi a autre chose que la batterie : Frank Zappa, Roger Waters, Pete Townsend

DEREK : Eddie Van Halen… “Eruption” m’a donné envie de jouer de la musique et a formé mon style. Et quand j’ai vu comment ils prenaient du plaisir sur scène, je me suis dit : c’est ça que je veux faire.

 

Quelques mots pour le public français pour terminer ?

DEREK : Je crois que j’ai joué ici en 89 avec Alice Cooper pour la première fois, j’ai toujours aimé le public français et votre culture. Je suis pressé de revenir.

MIKE : Le live de Dream Theater, Once in a lifetime, avec Derek a été enregistré au Bataclan, ici. Derek et moi avons une connexion musicale avec vous autres.

 

Merci beaucoup pour votre temps, on vous verra avec plaisir l’été prochain avec Sons of Apollo au complet.

DEREK & MIKE : Ça a été un plaisir merci à vous.

Une interview réalisée en septembre 2017 par Stéphane Mayère et Cyrille Delanlssays
Traduction : Stéphane Mayère
Remerciements à Valérie Reux

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